Emmanuel Marcon voudrait pouvoir bannir les cyberharceleurs sur les réseaux sociaux sans passer par un juge. Cette annonce soulève plusieurs problématiques techniques et légales, notamment au niveau européen et sur la question de l’anonymat.
Interrogé par 01net au sujet des propos tenus par Emmanuel Macron, qui voudrait bannir – sans juge – les cyberharceleurs des réseaux sociaux, Alexandre Archambault, avocat spécialiste du numérique, rappelle que la France ne peut pas « s’asseoir sur les fondamentaux d’État de droit » :
« Si les États membres veulent ajouter des nouvelles obligations supplémentaires à celles prévues par le DSA, ils peuvent le demander, mais il faut un consensus au niveau européen. Elles ne doivent pas être incluses dans des lois nationales qui vont revenir à fragmenter l’application du DSA. Si la France le fait, qu’est-ce qui empêchera demain Victor Orban ou la Pologne de demander à un hébergeur de retirer des contenus LGBT ? »
La France va se heurter à l’Europe
La Commission européenne a déjà rappelé que les États-membres ne devaient pas, sur un « domaine réservé » déjà traité par Bruxelles, édicter des règles plus strictes. Ce que Thierry Breton rappelait récemment, en réponse à une question de l’eurodéputé (LR) Geoffroy Didier. La réponse est arrivée avant la volonté d’Emmanuel Macron de se passer d’un juge, mais après le projet de loi qui prévoit de bannir un cyberharceleur.
L’eurodéputé l’interrogeait en effet sur le projet de transposition, en droit français, des règlements sur les marchés numériques (Digital Markets Act – DMA) et les services numériques (Digital Services Act – DSA), alors que « seule la Commission est habilitée à prendre des mesures coercitives à l’encontre des grandes plateformes en ligne, conformément aux dispositions des règlements européens » :
« Comment la Commission envisage-t-elle de se saisir de la question de la proposition française qui ajoute aux réglementations européennes des normes nationales plus exigeantes qui n’auraient pas été préalablement négociées avec les institutions européennes ? »
Le commissaire européen au Marché intérieur lui a répondu de façon « particulièrement cinglante », précise 01Net :
« La Commission est prête à mettre en œuvre des moyens coercitifs pour empêcher toute initiative nationale. Les États membres devraient s’abstenir d’adopter des législations nationales qui feraient double emploi avec ces règlements ou qui créeraient des dispositions plus strictes ou plus détaillées dans les domaines réglementaires concernés ».