Le DMA et le casse-tête de l’interopérabilité des messageries

Le DMA et le casse-tête de l'interopérabilité des messageries

Le Digital Market Act prévoit d’obliger les principales plateformes de messagerie à l’interopérabilité. De nombreux experts et professionnels de la sécurité y voient une usine à gaz insurmontable. Les co-fondateurs de Matrix, un protocole promouvant précisément l’interopérabilité, y voient du pain béni pour le futur des messageries.

« Les législateurs de l’UE ont convenu que les plus grands services de messagerie (tels que WhatsApp, Facebook Messenger ou iMessage) devront s’ouvrir et être interopérables avec les plus petites plateformes de messagerie, si elles en font la demande », lisait-on dans les négociations autour du Digital Market Act, que les négociateurs du Parlement européen et du Conseil ont validé la semaine passée :

« Les utilisateurs des petites ou grandes plateformes pourront alors échanger des messages, envoyer des fichiers ou passer des appels vidéo sur toutes les applications de messagerie, ce qui leur donnera un choix plus large. »

Ne seront concernées que les sociétés « dont la capitalisation boursière atteint au moins 75 milliards d’euros ou dont le chiffre d’affaires annuel dépasse les 7,5 milliards d’euros ».

Si Signal et Telegram seront donc a priori épargnés, un telle interopérabilité n’est pas sans poser problème : comment faire, par exemple, pour rendre interopérables des messageries chiffrées de bout-en-bout (E2EE) telles WhatsApp avec celles qui ne le sont qu’en option, comme Facebook Messenger ?

Andreas Schwab, rapporteur du Parlement européen sur le dossier, expliquait à TechCrunch que « cela viendra, mais il faudra aussi que ce soit sécurisé. Si les autorités de régulation des télécommunications déclarent qu’il n’est pas possible de proposer des discussions de groupe chiffrées de bout en bout dans les neuf mois à venir, nous le ferons dès que cela sera possible, cela ne fait aucun doute. »

Selon lui, les services de messagerie soumis à l’exigence d’interopérabilité devront ouvrir leurs API aux concurrents afin de fournir une messagerie interopérable pour les fonctionnalités de base. L’exigence étant intentionnellement asymétrique, cela signifie que les services de messagerie plus petits qui ne relèvent pas du DMA ne sont pas tenus de s’ouvrir aux gardiens (« gatekeepers »), mais peuvent eux-mêmes se connecter aux Big Tech :

« Les premières fonctionnalités de messagerie de base seront les messages d’utilisateur à utilisateur, les appels vidéo et vocaux, ainsi que le transfert de fichiers de base (photos, vidéos), puis au fil du temps, d’autres fonctionnalités telles que les discussions de groupe viendront. Tout doit être chiffré de bout en bout. »

En attendant la version définitive du texte, on se référera aux projets d’interopérabilité du DMA qu’avait tweeté Benedict :

« Permettre à tout fournisseur d’[apps de messagerie], à sa demande et gratuitement, de s’interconnecter avec les [apps de messagerie] de l’opérateur. L’interconnexion est assurée dans des conditions et une qualité objectivement identiques à celles qui sont disponibles ou utilisées par l’opérateur, ses filiales ou ses partenaires, permettant ainsi une interaction fonctionnelle avec ces services, tout en garantissant un haut niveau de sécurité et de protection des données personnelles. »

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